La fiscalité du PER est-elle en passe d’être réformée ?
Un rapport sur la fiscalité de l'épargne retraite, au cœur des débats
Commençons par préciser le contexte :
Le 20 décembre 2023, la commission des finances de l’Assemblée nationale a approuvé la création d’une mission d’information, demandée par le groupe Horizons, sur la fiscalité de l’épargne par capitalisation finançant la retraite.
L’objectif ? Évaluer l'état de l'épargne retraite ainsi que ses perspectives d'évolution, avec un focus sur l'accessibilité et la compréhension des produits (tels que le PER, PERO, PERIN). Il faut dire que le timing était plutôt opportun : à peine quelques mois après l’adoption houleuse de la réforme des retraites, et cinq ans après la loi PACTE, un petit bilan s’imposait !
Deux co-rapporteurs ont alors été nommés : les députés Charles de Courson (groupe LIOT), et Félicie Gérard (groupe Horizons), ont été chargés d’auditionner des experts en fiscalité et en économie, des représentants des administrations publiques, des syndicats, des organisations patronales, ainsi que les acteurs du marché tels que les banques, les assurances, et des associations d'épargnants pour dresser une évaluation complète des dispositifs en vigueur.
Le 24 septembre 2024, le rapport de cette mission d’information, basé sur plus de 20 auditions auprès de près 70 experts et professionnels, a été présenté à la commission des finances.
Les conclusions du rapport sur la fiscalité de l'épargne retraite
Le constat initial est plutôt (très) encourageant : le PER a connu un essor formidable depuis la mise en place de la loi PACTE, avec des encours qui sont passés de 5,9 milliards d’euros en janvier 2020 à 108,8 milliards d’euros en mars 2024 !
Mais… doucement sur les confettis : malgré cette performance impressionnante, les rapporteurs estiment que l’utilisation du PER reste encore un peu timide, notamment chez les ménages les plus modestes et les jeunes.
Certains problématiques sont pointées du doigt, comme :
- Des modalités fiscales qui restent complexes,
- Un manque d’information et de lisibilité sur le dispositif,
- Une faible adoption chez les foyers aux revenus faibles, qui préfèrent des placements plus liquides comme le livret A ou l’assurance vie.
Face à ces constats, les rapporteurs suggèrent plusieurs pistes pour améliorer le PER et le rendre plus attractif.
Les mesures formulées pour améliorer le PER
Le rapport comporte pas moins de 17 recommandations. On ne va pas vous assommer en les passant toutes en revue, mais en voici quelques-unes qui méritent d’être citées :
- La création d’une fiche d’information standardisée pour mieux comprendre les frais, la mise en place de simulateurs en ligne, ainsi que l’organisation de sessions publiques d’éducation financière.
- L’uniformisation des taux de prélèvement de la CSG sur les rentes du PER, pour rendre le dispositif plus attractif auprès des ménages modestes. Actuellement, il existe en effet deux régimes : l’un avec un taux fixe de 9,2%, et l’autre, plus progressif, allant de 0% à 8,3% selon les revenus. Ce système a, selon les rapporteurs, tendance à pénaliser les ménages modestes, tandis que les plus aisés atteignent facilement le plafond.
- Le renforcement des plans d’épargne retraite dans le cadre professionnel (recommandation qu’on ne peut évidemment qu’approuver chez Gedeon) : les rapporteurs estiment que les PER collectifs et obligatoires, mis en place au sein des entreprises, représentent une solution adaptée pour démocratiser l'épargne retraite parmi les ménages modestes, ils proposent donc l’obligation, pour toutes les entreprises de plus de 11 salariés, de mettre en place un PER, sans toutefois rendre les versements obligatoires, ni pour l’entreprise ni pour les salariés.
Mais soyons clairs, s’il ne fallait retenir qu’une seule mesure préconisée par ce rapport, ce serait probablement la suivante : la suppression des avantages fiscaux dont bénéficient les PER conservés après le départ en retraite. On vous explique ça plus en détails.
Certains avantages fiscaux du PER dans le viseur
En clair, le rapport préconise de :
1) Taxer les versements en cas de succession : actuellement, si un épargnant décède avant la liquidation de son PER après avoir déduit ses versements pendant sa vie active, aucun impôt n'est perçu. Le rapport propose de soumettre les héritiers à l'impôt sur le revenu sur ces sommes déduites, tout en rendant cet impôt déductible de l'actif successoral pour éviter une double imposition.
2️) Créer une double limite d’âge : la souscription serait interdite au-delà de 67 ans et la liquidation interviendrait automatiquement à 70 ans. L’idée étant d’éviter que les bénéficiaires utilisent le PER comme un instrument d’optimisation fiscale et non comme une stratégie de préparation à la retraite.
Bien que ces mesures puissent être perçues comme une perte de liberté pour les épargnants, elles sont présentées dans le rapport comme une manière de supprimer une “niche fiscale qui ne dit pas son nom”, et qui, selon Capital, coûterait à l’État entre 3 et 4 milliards d'euros par an…
Quelles suites pour le rapport : vers une réforme du PER ?
Pour l’instant, on ne sait pas trop quelles suites concrètes vont être données à ce rapport. Il est probable que certaines évolutions réglementaires soient envisagées pour améliorer l’efficacité et l’équité du système.
Mais certains acteurs appellent toutefois les législateurs à faire preuve de prudence et à ne pas se lancer dans des réformes hâtives. Dans l’Express, Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne rappelle en effet que le PER est un dispositif encore jeune et insuffisamment éprouvé : "Si tout travail d’évaluation est louable, il ne doit pas aboutir à déstabiliser un produit d’épargne qui, par nature, a besoin de temps pour faire ses preuves. La stabilité des règles est indispensable".
Reste donc à savoir si le gouvernement suivra les recommandations de réforme de ce rapport, ou s’il privilégiera la stabilité pour préserver un dispositif en pleine croissance… Le futur nous le dira !
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